mardi 17 mai 2011

Comme la caverne d'Ali Baba

Ce billet fait suite à L’art de se « revirer sur un dix cennes ».


Ce documentaire pour les enfants de 8 ans et plus, Les compositeurs, je l’ai d’abord acheté pour moi. Parce que je suis curieuse. Parce que je suis une mélomane qui aime découvrir de nouveaux styles musicaux. Parce que je voulais mieux comprendre (et apprécier) la musique classique.  C’est bien après que j’ai eu l’idée de créer une activité qui ne demande qu’une feuille blanche et des crayons.

L’auteur de ce livre-CD, Claudio Ricignuolo, présente aux néophytes la musique classique comme une caverne d’Ali Baba. « Ses trésors cachés se révèlent aux oreilles de ceux qui savent la découvrir. » Le livre décrit une trentaine de grands compositeurs, les différentes époques qui composent la musique qu’on désigne « classique » et un lexique. Le CD l’accompagnant présente 51 extraits de pièces regroupés selon quatre thèmes :  l’appel de la nature, l’expression des sentiments, les héros et les batailles et les voyages musicaux. Avant chaque pièce musicale, il y a une brève explication pour nous aider à mieux la comprendre.


Imaginez que vous êtes un producteur de films…

D’abord, je demande aux enfants ce qu’ils pensent de la musique classique. En toute honnêteté. Après des réponses :  « Ben, c’est pas pire », je répète : En toute honnêteté.

Certains (ceux qui jouent du piano, par exemple) apprécient. La plupart me disent que c’est plate, que c’est ennuyant. D’autres ajoutent : « C’est juste de la musique d’ascenseur. » J’ai fait cette activité à quelques reprises et j’ai toujours droit aux mêmes commentaires. J’insiste pour qu’ils m’expliquent ce qu’ils n’aiment pas. « C’est trop lent », dira l’un. « Ça bouge pas », dira l’autre.

Je leur lance un défi, pour la prochaine heure : de faire preuve d’ouverture d’esprit. D’essayer de découvrir quelque chose qu’ils ne connaissent pas. Et je leur dis que c’est correct de ne pas aimer. Que c’est comme la nourriture. Quand on est petit, il y a des aliments qu’on n’aime pas…« Oui, c’est vrai! Quand j’étais petit, je détestais les sushis. » Encore là, peu importe le groupe devant moi, on me donne toujours des exemples concrets pour soutenir mon point de vue.   

Ensuite, je fais le parallèle entre la musique symphonique et le cinéma. Car sans la musique au cinéma, les films seraient ennuyants. Les scènes d’action seraient moins enlevantes.  Les scènes d’amour moins émouvantes.  Dans Titanic, même si je sais ce qu’il adviendra des personnages, lorsque je vois les musiciens se retrouver sur le pont pour jouer une dernière fois, je pleure à coup sûr. Avec les élèves, je me risque à siffler des mélodies de films connus : Star Wars, E.T, Harry Potter… Celles-ci ont en commun le compositeur John Williams. Les yeux des élèves deviennent grands : ils reconnaissent.

La musique raconte des histoires. Ensemble, nous tentons de les découvrir. Je leur fais habituellement écouter l’extrait 3 du CD : Le matin de Grieg. On se concentre sur les instruments (et la présentation). On fait un retour : les élèves croient que les flûtes et hautbois sont des petits oiseaux et que lorsque les autres instruments résonnent, c’est que tous les animaux de la forêt se sont réveillés.

Ensuite, je reviens à ce qu’ils m’ont dit au début de la rencontre : la musique classique, c’est trop lent, ça ne bouge pas. « Vous êtes certains? » J’aime bien leur lire le chapitre du livre au sujet de Wagner. Car sa tétralogie intitulée L’anneau du Nibelung raconte (entre autres) l’histoire du nain Alberich qui aurait dérobé l’or du Rhin afin de forger un anneau aux pouvoirs magiques. Ça vous rappelle quelque chose? Il y a toujours un garçon pour me répondre :«Oui, ça  ressemble au Seigneur des Anneaux.» Et il a raison, car Wagner et Tolkien se sont inspirés des mêmes mythes anciens. On écoute ensuite l’extrait « Chevauchée des Walkiries » et on fait un retour sur ce qu’on a imaginé.

C’est après ces deux écoutes que je leur propose l’activité. Au lieu d’être un compositeur qui invente une musique pour accompagner un film, je leur demande de faire le processus inverse : ils doivent écouter une musique et en inventer une scène de film. Est-ce que ce film se déroule dans le passé, le présent, le futur ou un autre monde? Quel genre de film? Quels sont les personnages présents?

Je choisis une pièce musicale (pas un extrait provenant du livre-CD, mais une pièce complète), je leur demande de déposer leurs crayons, d’écouter en portant attention au rythme et aux instruments choisis. Lorsqu’ils sont prêts, ils peuvent commencer à dessiner leur scène…

Cette activité peut être utilisée en arts plastiques ou simplement un après-midi, alors que les élèves sont trop agités pour faire un quelconque travail constructif.  Et pourquoi ne pas s’inspirer de pièces musicales pour en faire une activité d’écriture?

Les compositeurs
Claudio Ricignuolo
«La grande musique à la portée de tous»
Fides, 2004

2 commentaires:

  1. Wow. Géniale comme activité.
    Si seulement j'avais eu de bonnes idées comme ça pendant mes stages ;)

    Mais sinon, les jeunes réagissent bien? As-tu eu le temps de lire le genre d'histoires que ça suscite chez eux?

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  2. Pat: L'idée de l'activité d'écriture, je l'ai eue en écrivant ce billet, donc je ne l'ai jamais essayée.

    Pour l'activité "scène de film en dessin" telle que je l'ai décrite, oui, les enfants réagissent bien. Il peut bien y en avoir un ou deux à l'occasion qui font des niaiseries (habituellement, c'est imiter les gestes d'un chef d'orchestre alors qu'on écoute la musique), mais sinon, les groupes participent bien. Je pense que tout est dans la façon de présenter... Les enfants aiment beaucoup partager leurs idées, expliquer ce qu'ils ont dessiné.

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